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« Je suis le chauffeur de monsieur Niedziela »

Une rencontre inopinée lors du blocage d’ArcelorMittal par les salarié·e·s de GEPOR.

4h45 du matin, la file de véhicules à l’arrêt que je remonte à pied indique que l’opération de blocage est en cours. Il ne pleut pas encore et les équipiers du travail posté de 5 heures sont pour la plupart sortis de leur voiture se réunissant en petits groupes. La nuit est encore sombre et la police sur place commence à organiser la circulation. Les camions se garent le long de la rue du Port et de l’avenue de Lorraine les uns derrière les autres. Seules les équipes chargées de la sécurité sont autorisées à rentrer. Les renseignements territoriaux notent les informations à faire remonter alors que quelques journalistes capturent images et paroles. Un feu attire les regards hagards de celles et ceux qui viennent de se réveiller.

Ce n’est pas une opposition « par principe » à la fusion des ports lorrains mais les 22 salarié·e·s de GEPOR sont surtout face à une direction qui fait mine de ne pas comprendre. Ce matin, poussé·e·s à bout, ils/elle bloquent l’entrée du site de Sainte Agathe d’ArcelorMittal.

Nous l’avons détaillée dans l’article précédent, la fusion des ports lorrains laisse planer un doute sérieux sur l’avenir des salarié·e·s de GEPOR. Selon la direction d’ArcelorMittal, cet avenir se trouverait dans une p’tite filiale spécifiquement créée dans le groupe Rhénus, partie prenante tout comme ArcelorMittal dans le consortium qui pilotera les ports lorrains. Pour les intéressé·e·s, la direction ne prend ici aucun risque et souhaite se débarrasser de salarié·e·s gênant·e·s. C’est ce qu’a également compris le député François Ruffin en visite à Metz ce 30 septembre : « Là vous refusez une nouvelle filialisation, de ne pas être mis à l’extérieur de Arcelor parce que une fois que vous êtes à l’extérieur non seulement on baisse vos salaires mais en plus la sécurité de l’emploi, ça donnera pas la même bagarre si jamais on met en cause votre emploi que si vous êtes à l’intérieur d’Arcelor. […] Pour l’instant, il n’y a même pas de coquille vide et ils vous disent d’habiter une coquille qui n’existe pas ».

Mieux encore, la position de la direction est qu’on ne peut plus faire marche arrière. Les salarié·e·s entendent démontrer le contraire. Une marche arrière qui serait au goût de François Grosdidier, maire de Metz et président de Metz Métropole, qui « veut dynamiter le projet [de fusion] des ports lorrains par la CCI54 » comme le rapporte le maire de Florange, Rémy Dick, qui était venu échanger avec les salariés.

« François Grosdidier veut dynamiter le projet des ports lorrains par la CCI54 ! »

Au levé du jour, sous une pluie désormais soutenue, celle et ceux qui ont été prié·e·s de quitter le groupe décident de bloquer également l’entrée des véhicules des grands-bureaux, avenue des Tilleuls, juste avant l’arrivée des premiers employés. La manœuvre est rapidement payante puisqu’après quelques minutes, c’est le conducteur d’une berline qui leur révèle l’identité du gros poisson de la matinée : « Je suis le chauffeur de monsieur Niedziela » le directeur général d’ArcelorMittal France. On se rappellera que les GEPOR avaient fait appel au sous-préfet de Thionville pour obtenir un face à face avec le dirigeant, sans succès jusqu’à présent.
« Si vous me laissez rentrer, je trouve une salle et on discute » va finir par lâcher Niedziela.

Mais c’est seulement aux alentours de 10h30 que le DRH de GEPOR informe les délégués syndicaux que la rencontre n’aura pas lieu avant « midi, midi trente ». Parait-il que les visioconférences passent avant la résolution des conflits sociaux.

Entre les salarié·e·s, les discussions tournent désormais autour de l’arrivée du personnel posté de 13 heures et de la façon de rendre le blocage plus efficace. Des salariés ont en effet réussi à le contourner en passant par un des nombreux accès du site. Je quitte le piquet alors que la camionnette GEPOR part sur une tournée d’inspection.

On me dit que la réunion a eu lieu et que les négociations n’ont pas été une partie de plaisir.